Aujourd’hui on essaye de faire le pont entre les quantités électriques macroscopiques (intensité, tension…) et ce qu’il se passe au niveau microscopique dans les fils électriques. Un sujet pas si souvent traité !
Si vous êtes encore sur votre faim après ce plat de résistance, voici quelques compléments.
Drude et les électrons libres
La vision microscopique que je présente est essentiellement celle du modèle de Drude. Bien sûr dans la vidéo j’ai allègrement ignoré les quantités vectorielles, et je suis resté assez flou sur la façon exacte dont on passe des quantités instantanées aux quantités moyennes mais le modèle traite ça mieux. Une quantité intéressante, c’est le temps caractéristique des collisions souvent noté \(\tau\) et qui intervient dans l’expression de la force de frottement effective. Ce temps peut être extrêmement faible, de l’ordre de quelques millionième de milliardième de secondes. On comprends donc qu’aux échelles de temps considérées macroscopiquement (même en courant alternatif), on peut largement considérer l’effet des collisions comme une moyenne.
Un point amusant qui sort de tout ça, c’est la réponse à la question que l’on se pose parfois « quelle est la vitesse du courant électrique ? ». Cette question a en quelque sorte 3 réponses. La vitesse instantanées des électrons est leur vitesse thermique, de l’ordre de 1000 km/s. Leur vitesse de dérive est 1 milliards de fois plus faible, de l’ordre du mm/s. Mais la vitesse de propagation de l’information dans un circuit électrique reste elle de l’ordre de la vitesse de la lumière.
Je parle à un moment de la notion d’électron libre, il faut savoir que cela correspond en général à un modèle plus sophistiqué que le modèle de Drude, où l’on traite les fonctions d’onde des électrons et l’on montre que certaines sont en quelque sorte délocalisées dans le métal. D’ailleurs je me demande bien comment l’expression « électron libre » a pu passer dans le langage courant à partir de ça !
Vitesse de l’électricité et charges de surface
Je l’avoue, l’envie de faire cette vidéo m’a été donnée au départ par la vidéo de Veritasium sur l’électricité, même si à la fin je me retrouve à parler de choses différentes. J’ai quelques réserves sur la façon dont Veritasium amène et présente les choses dans cette vidéo-ci, mais je suis content qu’il ait fait cette vidéo car ça été l’occasion de plein de vidéos complémentaires par plein d’autres gens (y compris par lui). Et je trouve que l’ensemble de la séquence a été l’occasion de mieux comprendre et clarifier certaines notions.
Un point remarquable a été notamment amené par Ben Watson qui a fait plusieurs vidéos de complément, et qui concerne le rôle des charges de surface. C’est comme ça que je me suis retrouvé à lire les travaux de Sherwood & Chabay, et notamment leur papier « A unified treatment of electrostatics & circuits » dont est inspirée la fin de la vidéo. Ils développent un argument (déjà connu mais largement passé sous silence) concernant la responsabilité des charges de surface dans la conduite du champ électrique.
J’ai trouvé cet argument remarquable, il est d’ailleurs développé dans un bouquin dont je n’ai lu que le chapitre associé, mais que j’ai trouvé remarquablement bien écrit. Ici le site web du bouquin dont la prochaine édition sort en 2025, je suis curieux de lire ça !
8 Comments
Bonsoir David et merci beaucoup pour le travail pédagogique que vous faites ,mon niveau n’est pas très élevé (j’ai quitté le lycée en fin de seconde) je reste passionné de chimie et d’électronique (mes capacités cognitives sont pour le moment Grandement affectées par la morphine que je suis obligé de prendre dans l’attente d’une opération du dos que j’attends avec impatience ‘début d’année prochaine .J’ai vu la vidéo de Véritasium et (vous connaissez peut être l’énergumène qui lui a répondu ) : il s’agit de ElectroBOOM qui me fait bien rire (le mot est faible^^).
Amicalement . EK
Merci pour cette vidéo bien intéressante!
Ça me rappelle des calculs faits expliquer la loi des gaz parfaits, à partir de considérations microscopiques, pour retrouver au final la loi au niveau macroscopique qui lie pression, volume et température (le fameux P*V = n* R* T)
Merci beaucoup David, ta vidéo était excellente, comme toujours.
Lorsqu’un électron percute une particule neutre dans l’air, cela libère de nouveaux électrons et des ions positifs et c’est l’avalanche de ce phénomène couplé à un bombardement de la cathode par les ions positifs qui vont créer des décharges électriques. La quantité importante est le libre parcours moyen qui va influer sur la probabilité d’ionisation des collisions.
Je me posais la question, au moment où on met en route le circuit (donc dans un conducteur), il y a probablement un transitoire avant que le courant ne se crée, et bien est-ce qu’à ce moment nous n’aurions pas un phénomène équivalent ?
Bonjour,
Peut être serait il intéressant de faire une analogie de type hydraulique. Je penses par exemple au conduit d une aspirateur . Dans celui-ci le champ de force qui agit sur les molécules d air , grâce au réactions des parois peut être modélisé par des tranches equipotentielles perpendiculaires a l’axe du tuyau. En Dans chaque tranche on a des forces de réactions avec composantes radiale ayant un même type d effet que la surface d un conducteur électrique produit sur le champ électrique. Dans l’analogie, la surface du tuyau module la forme du champs résultant des forces d aspiration.
Bonjour David,
Je ne vais pas être très original, et dire que moi aussi, j’attendais cette vidéo depuis longtemps.
C’est aussi l’avis de mes deux filles qui ont été instruites durant 10 ans à domicile et qui viennent cette année de réintégrer, collège et lycée. Cette expérience d’instruction à la maison, leur sera utile et toute leur vie.
J’aimerais rendre la pareille, ayant eu l’immense privilège de m’entretenir de ce qui va suivre avec quelqu’un que vous devez bien évidemment connaître, Hubert Reeves.
Il a été en quelque sorte le parrain scientifique de mes enfants, et j’ai pu à plusieurs reprises, discuter physique, psychanalyse et surtout musique avec lui. N’étant physicien que dans l’intérêt de le coupler avec mon travail de recherche en psychanalyse, je n’étais bien évidemment avant tout qu’auditeur dès qu’il parlait astrophysique.
Étant musicien, en tout premier lieu (Berklee >Boston, CNSM, CIM Paris, cursus de musique baroque, travail avec Pat Metheny, John Scofield, et tant d’autres choses encore) je me suis penché sur la didactique de l’enseignement concernant l’improvisation en jazz par le biais de la conduite des voix, typique de la polyphonie baroque du 18e.
Pour mettre fin à l’habituelle pratique d’une guitare, en aveugle, plaquant, récitant, sans aucune réflexion.
J’ai eu l’occasion d’en parler à la Royal School de Londres, ainsi qu’à la Guildhall, durant un week-end assez pompeux… Estampillé…VIP… Mais c’était sympa quand même.
Ayant noté la présence de quelque ovation, ou autre… M’étant dit bien entendu que l’introduction guitare devait être signée par l’auteur, si un quelconque intérêt existe chez vous, pour aller plus loin, dans la pratique de l’improvisation, je serai ravi d’être un temps votre interlocuteur bénévole, au combien reconnaissant…
Dites-moi…
Hugo Bordelet
Wow je crois que c’est ta meilleure vidéo jusqu’à présent ! Apparemment c’était encore possible.
Je suis le seul à avoir entendu « paf il se prend un gnon » ? 🙂
J’avoue que j’en suis assez fier 🙂
Bonjour,
À 29 min du vidéo « Les charges excédentaires se retrouvent à la surface … ».
Très juste mais il faut préciser que les charges (électrons) de conduction sont répartis de façon homogène sur toute la section. Également les charges de conduction sont immensément plus nombreuses que les charges excédentaires. (La résistance est donc indépendante du courant.)
NB. Le fait que les charges excédentaires se retrouvent à la surface n’a aucun rapport avec l’effet de peau qui lui n’intervient qu’en courant alternatif (et davantage en hautes fréquences).
Ce qui rend vos vidéos intéressantes, c’est que vous raisonnez au niveau physique sans se cacher derrière les mathématiques. Ces dernières ne doivent intervenir que postérieurement.