La vidéo du jour nous parle de l’étonnante histoire génétique de l’intolérance au lactose.

Je profite de ce billet pour revenir plus en détail sur le cas de la carte de la tolérance, que je vous remets ci-dessous.

06-carte

J’ai pris cette carte dans la publication citée en référence [1], et il faut savoir qu’ils l’ont réalisée à partir de données publiées ailleurs [2]. Par ailleurs la carte est une interpolation, les points noirs représentant les lieux pour lesquels il existe effectivement des données dans la littérature. Enfin l’idée de cette carte est de ne représenter que les populations « indigènes », avant les périodes de grandes migrations. Ce qui explique peut-être pourquoi l’Amérique n’est pas représentée : ce serait possible mais je ne sais pas s’il y a des données; mais surtout ce serait trompeur puisque la carte ne serait valable que pour les populations natives, qui sont minoritaires en Amérique.

D’ailleurs dans le même genre, il y a vraisemblablement une erreur en Nouvelle-Zélande. Les auteurs ont dû prendre des valeurs de descendants d’européens, ce qui par l’effet de l’interpolation rend cette zone « verte » ainsi que le sud-est de l’Australie.

 

[1] Gerbault, Pascale, et al. « Evolution of lactase persistence: an example of human niche construction. » Philosophical Transactions of the Royal Society B: Biological Sciences 366.1566 (2011): 863-877.

[2] Ingram, Catherine JE, et al. « Lactose digestion and the evolutionary genetics of lactase persistence. » Human genetics 124.6 (2009): 579-591. La table contenant les données brutes est disponible ici.

26 Comments

  1. Merci pour cette vidéo ! De quoi apporter des éléments de réponses à ceux qui croient (ou affirme, comme un certain Pr. Joyeux, quoique plus porté sur les vaccins en ce moment) que le lait est mauvais pour la santé…

    • Il n’y a là aucune preuve que le lait soit bon pour la santé. Ce n’est pas parce que le corps peut digérer une substance qu’elle est forcement bonne.

      • David Reply

        Je suis bien d’accord avec vous : ça n’est pas le fait qu’on puisse le digérer qui prouve quoi que ce soit. Par contre l’effet de sélection positive énorme (j’insiste car c’est quantifiable) permet d’exclure un effet nocif général.

      • À mon avis, la mutation du gène est apparue pour pouvoir arrêter les infections dues à l’impossibilité d’absorber du lactose (ou/et le lait en général).
        Car au Sénégal, au Pakistan et dans la péninsule arabique le soleil fait plutôt rage (donc pour moi la question de vit. D est à « bannir »).

        La sélection peut très bien avoir lieu grâce à des produits utiles, qui peuvent s’avérer néfastes par la suite. Comme pour la peinture au plomb: toxique, les jolies montres fluorescentes: radioactives et les antibio avec du chlorure de mercure: ultra toxique.
        Les pesticides, par exemple, ont sûrement été très bénéfiques après la guerre, mais pourquoi encore les utiliser ? Elles causent plus de dégâts que le faible rendement qu’elles permettent. Le lait aussi va, encore, nous réserver beaucoup de surprises…

      • Bonjour Centauri,

        Vous avez raison d’être prudent mais dans le cas du lait, contrairement à d’autres substances, il y a une particularité qui tient au fait que nous partageons tous la lactase et le lait maternel dans notre petite enfance. La question qui doit donc se poser, et qui pourrait apporter un élément de réponse à votre question sur la toxicité du lait pour les adultes, est donc : Pourquoi la lactase n’est-elle plus produite après le sevrage chez les mammifères ?
        Et je vois bien une forme de raisonnement qui tendrait à faire dire que si l’évolution a fait que le lait ne soit plus digeste après le sevrage alors c’est que ce n’est pas bon de continuer à en boire. Et bien sûr, c’est un non sens. Car le fait que ce ne soit pas bon pour la survie de l’espèce ne signifie pas que c’est mauvais pour la survie de l’individu. D’ailleurs ne serait-ce pas justement la disparition de la lactase qui favoriserait le sevrage en permettant ainsi à la mère de faire une autre portée et aux petits de s’affranchir de la dépendance maternelle ? Le cas particulier de l’humain ne serait que le résultat du fait que lui, contrairement aux autres mammifères, à la possibilité de consommer le lait des autres espèces et donc peut continuer à en boire sans nuire à sa propre capacité à se reproduire. L’élargissement de ses sources de nourriture suffit à expliquer l’incroyable diffusion de ce gène à une époque où les disettes provoquaient des hécatombes.
        Après, nous sommes tous d’accord qu’un individu intolérant au lactose n’a absolument pas intérêt à boire du lait, mais les autres ?

      • @FrClem.
        Bonjour,
        La fonction première du lait maternel est de nourrir la progéniture. Cet aliment est particulièrement adapté – du fait de sa composition – aux besoins nutritifs et de croissance des jeunes sujets jusqu’à ce qu’ils soient sevrés, c’est-à-dire capables de digérer une palette plus large d’autres aliments .Un animal qui dépend strictement d’un autre animal pour vivre a une chance de plus de mourir : ici si la mère meure, l’exploitant du lait se trouve sans nourriture. Donc évolutivement c’est pas top. 😉

        <>

        MOI >>Il n’y pas de capacités supérieur inné. Des hommes ont décidé de boire du lait (bonne décision ou pas ils ont choisie ça) cela engendre donc une sélection d’homme qui peuvent boire du lait. Si je fait manger un produit légèrement toxique a des animaux il est fort probable que tous meurent mais aussi qu’une partie ne meurt pas, cette partie est pas forcement bonne ou ayant moins de maladies : elle peut juste contenir la substance toxique sans mourir.
        Après ont peut très bien vivre en étant un parasite, en exploitant des animaux (cela marche très bien pour beaucoup d’espèces). Mais moi je suis pas pour favoriser ma descendance a devenir des parasites. Je ne vais pas utiliser mon intelligence humaine pour boire du lait en exploitant des vaches (violer une vache, enlever son bébé, le manger, faire ça 5 fois et tuer la vache, esclave toute sa vie) Non moi j’utilise mon intelligence pour cultiver des plantes comme le choux (calcium) ou des légumes vert (vitamine D). Je pense que les choix éthique et morale font maintenant partie de la survie pour l’homme. De plus que le lait est mauvais pour la santé. En plus cela n’est absolument pas viable pour l’homme et la terre : je vous invite a voire Cowspiracy https://www.youtube.com/watch?v=v3ZLJzlTeH4&feature=share. Longue vie.

  2. Bonjour,
    Merci pour la vidéo.
    Concernant les Amériques, n’y a-t-il pas de données ?

    • David Reply

      Non pas de données que j’aie trouvé. La carte ne vaut d’ailleurs que pour les populations « indigènes », donc pour les américains descendants d’européens, c’est grosso modo comme leurs ancêtres.

  3. Pingback: L’intolérance au lactose est-elle ...

  4. Bonjour,
    Vous publiez la plupart du temps sur des sujets pour lesquels je n’ai aucune compétence et donc aucune capacité critique. C’est de l’information…
    Ce billet par contre touche à mon champ de compétences et appelle une ou deux remarques.
    La notion de ce qui est bon ou pas pour la santé est bien trop complexe pour dire que ceci ou cela est bon pour la santé de façon générale et sans nuance.
    Alors le lait bon pour la santé ? la réponse est à la fois oui et non, et ça dépend pour qui et ça dépend quand et ça dépend combien.
    Un apport en vitamine D n’en fait pas pour autant un aliment bon pour la santé, le lait contenant, on s’en doute, bien autre chose que la vitD.
    D’ailleurs l’apport en vitamine D par les produits laitiers selon la table CIQUAL (VERSION 2013 : https://pro.anses.fr/TableCIQUAL/index.htm) est extrêmement faible au regard d’autres aliments comme les poissons et notamment les poissons gras, et avec un degré de fiabilité relativement peu élevé.
    De plus en plus d’études récentes démontrent que les produits laitiers animaux peuvent être nocifs pour certaines populations (effet néfastes des protéines du lait sur la muqueuse intestinale avec perturbation de l’absorption). Des personnes qui vous lisent/entendent vont peut-être passer à côté de possibilités d’améliorer leur état de santé parce que vous aurez affirmé (comme d’autres, certes) que le lait est bon pour la santé et qu’ils n’iront pas chercher plus loin.
    La vulgarisation scientifique met à portée du plus grand nombre les évolutions de diverses disciplines et à ce titre elle est certainement nécessaire et utile, tout en impliquant une grande responsabilité de la part du « vulgarisateur ».
    Faire de la sous-information ou de la désinformation sur n’importe quel sujet en tombant dans le travers de l’ultra-simplification de sujets complexes ne rend pas les populations plus averties. Cela peut même contribuer à alimenter les doutes quant à la crédibilité des scientifiques et à faire ainsi le lit d’une méfiance généralisée, bien dommageable.
    Cordialement

    • Voulez vous dire qu’il ne faut pas vulgariser et laisser les sujets dits complexes aux seuls experts? Ce n’est pas mon point de vue. Sur des sujets qui sont de ma compétence ce blog a dit des choses erronées, ça n’empêche pas de le trouver globalement excellent. De plus, je trouve que l’approche de ce sujet, à savoir la tolérance au lactose, n’en masque pas la complexité et le ton reste prudent.

      Signé un ancien écolier qui a bu du lait comme l’y invitait Pierre Mendès France. http://www.mendes-france.fr/2007/11/13/souvenir-du-verre-de-lait/

    • Il y a certes une différence entre vulgariser et désinformer, mais il y en a aussi une entre pinailler et critiquer.

      Je crois que tout le monde ici est suffisamment intelligent pour se dire que n’importe quel aliment n’est pas bon pour tout le monde, n’importe quand et en n’importe quelle quantité. D’ailleurs, ce que vous dites ne change rien à l’idée que le lait soit globalement bon pour la santé.

      La vulgarisation n’est pas seulement nécessaire et utile, elle est primordiale. Le travail des spécialistes est la plupart du temps dénué de sens s’il n’aboutit pas à un travail de vulgarisation – et s’éteindra dans l’indifférence absolue. La vulgarisation de ce type de données serait d’ailleurs à approfondir : vous pouvez vous-même constater à quel point le public est mal informé sur ce sujet. La faute à quoi ? à qui ? Quel intérêt y a-t-il à garder ces informations entre les mains des seuls spécialistes ?

      Enfin, votre commentaire très négatif nuit sans doute bien plus à la crédibilité des spécialistes que la vidéo – en tout cas c’est l’effet produit sur moi. Si je commençais à reprendre de la sorte tous ceux que font des approximations et des raccourcis, voire des erreurs, sur mes domaines de prédilection, je passerai sans doute mon temps à déverser ma bile sur le net…

  5. La lactase ne pourrait-elle être qu’un effet secondaire d’une mutation autrement plus importante pour la sélection naturelle, mais moins visible (pour l’instant) ? Simple corrélation ou réel lien de cause à effet ?

    • David Reply

      On peut toujours imaginer des explications plus compliquées. Mais il faut noter que la mutation est très simple (une seule base) et qu’elle est apparue (elle ou ses variantes) à plusieurs endroits. Donc en 200 000 ans, elle a bien dû apparaître des tas de fois mais sans être sélectionnée, puisque l’élevage du bétail n’existait pas. Le fait que la diffusion rapide soit si récente laisse quand même bien penser à une interaction avec le fait de consommer des produits laitiers.

  6. Pingback: L’intolérance au lactose est-elle une maladie ? | Laminedor1fo

  7. Ce qui me fascine c’est qu’il ait fallu des dizaines de milliers pour que l’humanité ait manifesté une tolérance au lactose. On voudrait nous convaincre qu’en dix ans nous avons une tolérance au glyphosate.

  8. Ok cette fois je me lance parce que je tique à chaque fois et je me demande pourquoi tu fais ça : dans toutes tes videos tu as besoin d’un petit gros mots, un « putain » souvent, parfois un autre, pourquoi? Trouves tu que ça donne à la vulgarisation scientifique ou à toi même un air cool ?
    Je doute que tu en emploies aussi souvent que cela, du moins en français, et je suppose que tu prépares ton speech avant de tourner, donc on ne peut pas dire que c’est sorti dans le feu de l’action… Peut être que je suis la seule à le penser : ça sonne faux et c’est moche, je pense que tu devrais t’abstenir.

    • David Reply

      Dans toutes les vidéos ? Je veux bien un recensement car si c’est le cas je n’en avais pas conscience.
      En tout cas ça correspond à mon style naturel de conversation (mon speech est à moitié préparé car les idées sont écrites, mais pas les phrases détaillées), au risque de te décevoir, je pense que j’utilise beaucoup plus de gros mots dans la vraie vie 🙂
      (En tout cas quand je parle de science qui m’enthousiasme !)

      • Fair enough
        Et je comprends le lien de cause à effet avec l’enthousiasme… tes articles m’enthousiasment aussi beaucoup donc je vais certainement surmonter ce petit truc qui m’agace 😀
        (Lequel, s’il ne s’est pas produit dans toutes les videos que j’ai regardées jusqu’à présent, soit 4 : le pastis, l’homosapiens, l’énergie du vide et le lactose, il s’est produit dans 3 sur 4 avec certitude !)

      • David Reply

        Waouh ! Très sincèrement, dans les vidéos que tu cites je suis bien incapable de te dire à quel moment j’emploie des « gros mots ». Je crois qu’il faut que je le re-regarde…
        Du coup spoiler alert, la prochaine vidéo était déjà montée avant ton commentaire initial, elle arrive aujourd’hui et contient le mot « dégueulasse » ainsi qu’une allusion grivoise.

  9. Bonjour David,

    Merci pour ce site. Mais tes vidéos ne sont pas compréhensibles: polluées par un pub pour Orchestra qui diffuse en même temps ! Gasp ! C’est très énervant !

    Sinon pour les gros mots, tu aurais en effet intérêt à les laisser tomber. Ca ne te va pas.

    Une question que je me pose concernant la notion de « population native ». Faut-il comprendre: population qui se trouvait déjà sur site avant que ne commencent les pratiques d’élevage ? Ca ne doit pas être évident de trancher: natif ou non natif.

  10. apparition il y a 5 à 10k années,
    donc l’histoire des famines semble assez évidente (même si ce n est pas sans doute pas la seule : il peut y avoir des effets de synergie avec d autre, comme la vitamine D) :
    si un homme de cro-magnon risque de mourir de faim ou soif, alors, boire du lait peut le sauver…

    Donc c est un avantage évolutif pour lui, de ne pas mourir de faim ou soif de suite.
    qu’importe s’il risque de mourir d un cancer dans 30 ans, vu que, sans boire ce lait, il mourrait dans la semaine ou le mois : boire lui procure une survie suffisante pour se reproduire, et passer ses gènes à la génération suivante.

    Par contre, maintenant, au XXI siècle, en occident, il y a moins de famines qu’en 5000 avant JC…
    Ainsi, quand les autres ressources viennent à manquer, il est moins vital de prendre du lait pour passer la semaine.
    Et alors là, pour ceux qui pensent vivre au-delà de 35 ans, savoir si le lait peut donner un cancer devient une question vitale..
    Cette vidéo aurait été très bien en 5 000av JC, mais elle oublie de faire le point au XXI siècle, en occident, sur les problèmes du lait, alors que maintenant, contrairement à l époque où ces mutations sont apparut, on a plus des problèmes de surconsommation alimentaire que de carences..

    Le portrait de la tolérance au lactose fait dans cette vidéo est idyllique… mais parlant d un passé révolu :
    Il manque le volet actuel de cette tolérance, et de ses conséquences.

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